Catégorie : Récit

Quatre mille âmes, une rue principale, une gare, deux églises et une usine. Bienvenue à Charleroi ! Pas la ville wallonne fondée sur les rives de la Sambre. Non, la bourgade nord-américaine traversée par la route 88, dans la vallée de la rivière Monongahela. De Charleroi à Charleroi : l'hiver dernier, Paul Magnette a entrepris, avec quelques amis, un parcours à travers la "ceinture de l'acier", dans le nord-est des États-Unis, pour observer le redressement d’une région meurtrie depuis la fermeture des hauts-fourneaux et des aciéries. Pour Wilfried, qui ne recule pas devant le talent de jeunes pigistes, le bourgmestre socialiste en a tiré un récit de voyage, balade étonnée dans une contrée où de nombreux ouvriers ont voté Trump. Cette déambulation impressionniste est aussi une méditation sur une question aujourd'hui parmi les plus débattues de la sociologie politique : pourquoi les pauvres votent-ils à droite ?

Coupable d’un crime atroce, le jeune Emiel Ferfaille, un soldat du Westhoek, fut le dernier décapité de l’histoire de Belgique, des œuvres du plus célèbre des bourreaux français, Anatole Deibler. C’était il y a tout juste un siècle, alors que les Allemands lançaient une violente offensive sur le front de l’Ouest. Rendant épique le transport de la guillotine depuis Paris.

À La Louvière, dans les années 1990, les balcons de pierre bleue sont du même gris que les tombes et les bulletins de vote aussi rouges que le nœud papillon d’Elio Di Rupo. Dans une de ces petites maisons sans jardin qu’occupaient des familles venues d’Italie, grandissent une fillette et sa conscience politique. Cindya Izzarelli, journaliste touche-à-tout et chroniqueuse sur les ondes publiques, nous ouvre l’album de sa belgitude.

Le Verviétois Hasan Aydin deviendra-t-il, en 2018, le premier bourgmestre musulman de Wallonie ? Dans une ville au nom internationalement lié au djihad, la partie n’est pas gagnée. Des mines de Waterschei à la finance luxembourgeoise en frôlant l’ex-frontière soviétique, portrait en onze dates d’un socialiste atypique qui, à 45 ans, a une revanche à prendre.

C’est dans le besoin que l’on reconnaît ses vrais amis. Plus la justice espagnole essaie de mettre sous les verrous Carles Puigdemont et ses quatre ministres, plus s’agrandit en Flandre la cohorte de leurs supporters. Bières locales, gâteaux maison et horoscope optimiste : les exilés sont couverts de cadeaux. Nulle part ailleurs le leader indépendantiste catalan n’a été accueilli plus chaleureusement que dans les milieux proches de la N-VA. Ambiance « dos cervezas por favor », même si on y admet que l’affaire est tombée à point pour Bart De Wever, histoire de détourner l’attention de la stagnation communautaire sous Michel Ier.

Barbara Brodi, dont l’histoire musicale ne retiendra que le prénom, fréquente au début des années 1950 les cabarets bruxellois. C’était déjà une femme de résistance doublée d’une chanteuse politique qui marque certains élus de droite comme de gauche. C’est toujours le cas aujourd’hui, une vingtaine d’années après sa mort.

L’affaire de la champignonnière, meurtre crapuleux du Bruxelles des années 1980, toujours irrésolu à ce jour, tient à la fois du polar paranoïaque et du mystère à la David Lynch. D’un point de vue plus politique, ce « cold case » aux nombreuses fausses pistes fantasques démarre probablement aussi la tortueuse ligne du temps de dysfonctionnements judiciaires qui finit par aboutir à la réforme des polices, près de quinze ans plus tard.

« Un trou à rats », c’est l’expression que Donald Trump a utilisée pour qualifier Bruxelles. C’était aussi l’avis de Charles Baudelaire au milieu du XIXe siècle. Plus grand « hater » de la Belgique de tous les temps, le poète français a séjourné deux ans dans cette ville qui lui inspirait un dégoût total. Les visages belges ? « Blafards ou vineux. » Les femmes belges ? « Un vaccin contre l’amour. » Sa férocité n’épargne même pas le roi Léopold Ier, « misérable petit principicule allemand». Mais le fiel qui déborde de ses écrits ne le console pas. Sa vie est dans une impasse. Cent cinquante ans après sa mort, celui qui vivait avec une chauve-souris à l’hôtel du Grand Miroir hante encore les rues de Bruxelles.