Ce devait être une halte vers l’Eldorado, c’est devenu leur destination. Partis de Goiás et de Minas Gerais, ils habitent aujourd’hui Anderlecht et Saint-Gilles. Le soleil et les pão de queijo font place au ciel humide et aux poulycrocs. Les fermettes de maïs et les villes des hauts plateaux aux abords sinistrés de Bruxelles-Midi. Un quotidien laborieux à récurer des bureaux, à fixer des plaques de gyproc, à la merci des marchands de sommeil et des patrons magouilleurs. Les cinquante mille Brésiliens de Bruxelles forment une communauté immigrée peu connue, qui se retrouve à l’église pentecôtiste, sur les chantiers en intérieur et dans les bars de la Barrière. Où la « nostalgie teintée d’espoir » se noie dans trois traits de cachaça plutôt qu’un.
« Goiás é saudade em tudo que falo Ás vezes me calo por essa razão » Belmonte e Amaraí, « Saudade de Goiás » Le ciel était lourd et sombre, ce jour de décembre 2022, une pluie oblique lui cognait le visage tandis qu’il traversait les rues en chantier de Cureghem. Il avait rabaissé la capuche imbibée d’eau de son sweat rouge et s’était dit, ô trem, Edi, qu’est-ce que tu fous là. Il avait imaginé les balustres venteux du Tower Bridge, les écrans géants de Piccadilly, l’office du dimanche à la Saint Paul’s Cathedral, les footings au Hyde Park. Pas l’odeur de pisse